Françaises, français, réjouissez-vous : l’Hexagone compte un nouveau palmarès Fooding, dont les primé·es ont hissé haut les banderoles et porté les couleurs (bleu, blanc, rouge) ce lundi à Paris. Meilleure nouvelle vague, meilleur esprit d’équipe, meilleur bar à délices, meilleure auberge basco-saxonne, meilleur bistrot à flot, meilleure cuisine du marché, Fooding d’amour… Un casting de rêve acclamé comme un 14 juillet, sur le rooftop stratosphérique du Centre Pompidou, le temps d’une soirée administrée d’une main de maîtresse (de cérémonie) par l’humoriste Mahaut Drama et hautement ravitaillée par Le Cheval d’Or, Datil, Buttes, Palégrié Chez l’Henri, Ripaille, Kissproof, Choral, Razzia, Atelier Renata, Mắm From Hanoï, Manat et Mamiche.
Fooding d’honneur : Iñaki Aizpitarte
Retour aux fondamentaux pour le sieur Aizpitarte, déjà proprio du Chateaubriand (Meilleure table guide Fooding 2007), du Dauphin (Meilleur décor guide Fooding 2011) et du Cave à Paris, qui s’est replié dans sa base arrière pour (re)déployer son talent bistrotier au piano d’une vieille institution luzienne restée dans son jus.
Fooding d’amour : Le Flores, Saint-Hilaire-d’Ozilhan
Saint-Hilaire-d’Ozilhan, son millier d’âmes, son grand clocher, sa chapelle romane… et son bistrot de village ! Où se visser sur une chaise style Baumann, si ce n’est en terrasse à l’ombre d’un grand pin ou sous l’auvent rayé du restaurant, pour s’envoyer la popote sans chichis de la Perpignanaise Emmanuelle Lachaud (ex-Les Insolents à Uzès et La Courtille à Tavel), qui fait la part belle aux produits locaux bien castés.
Meilleur sophistroquet : Dandelion, Paris
Dandelion ? La traduction english du pissenlit, aussi appelé dent-de-lion… et le nom de ce très bon plan anguleux enraciné par Morgane Souris (ex-Parcelles) et Antoine Villard (ex-Septime et Double Dragon). Un bistrot néo mais pas trop (murs bruts, luminaires italiens chinés des années 70, bouquets de fleurs du designer floral voisin Ortie), où boulotter le pain de Ten Belles entre deux harmonieuses assiettes du chef.
Meilleur sophistroquet : 19 Saint Roch, Paris
L’oiseau est dans la cage, on répète, l’oiseau est dans la cage ! Après des escales de haute volée dans la capitale (Vivant 2, Déviant) et à Arles (Drum Café), en plus de quelques migrations internationales, Pierre Touitou a atterri en majesté rue Saint-Roch. Son nid ? Un ancien resto japonais remplumé de tomettes monochromes, bois massif et miroirs traversants, où il déploie une carte au sommet.
Meilleur bistrot à flot : Blossom, Vernon
Ohé, matelots ! Amarré à sa Seine natale, Gabin Rodes (croisé en pays guérandais, à La Mare aux Oiseaux, et à Saint-Jean-de-Luz, chez Rita) se la coule très douce dans cette cambuse nordique, à la vue pas piquée des hannetons. On y voit fleurir (blossom en VO) la végétation fluviale et passer les péniches, en sillonnant une carte blindée de produits normands sourcés à 100 kilomètres à la ronde grand max.
Meilleur café de quartier : Café Enez, Douarnenez
Il y a un siècle, les rues portuaires de la ville du poiscaille en boîte résonnaient de la colère de ses sardinières, leur grève historique marquant d’une pierre blanche l’histoire féministe et ouvrière. C’est peut-être ce parfum de révolte et d’entraide qui a poussé la cheffe Mahaut Le Lagadec (ex-Bonne Aventure à Saint-Ouen et Les Sardines à la Plage à Lancieux) à investir l’ancien Poullig, face aux mythiques Halles, pour y installer son café de quartier.
Meilleure cuisine du marché : Bistrot des Rosiers, Strasbourg
On est bien peu de chose, mais les amies du Bistrot des Rosiers n’en laissent rien paraître. Éclos dans la Krutenau à grand renfort de mobilier chiné, le néobistrot d’Anne-Sophie Barth (passée par Binchstub et Aida) et Bérengère Pellissard (ancienne cheffe du feu Comptoir à Manger) jardine une cuisine du marché fine et efficace, portée par un service aux petits oignons.
Meilleure pizza : Oobatz, Paris
Sans toit ni (four à) bois, Dan Pearson s’était déjà fait un nom majuscule en transmutant, le temps d’un intérim, le royal Rigmarole de Jessica Yang et Robert Compagnon en Pizzamarole Royce de la pizz’. Le trio sorcier a fini par s’associer pour de bon en mettant sur pâte Oobatz, à la cuisine carrelée couleur pain doré, où le génie des fermentations dompte le feu et le levain pour les plus fabuleuses pizzas jamais goûtées.
Meilleur bar à délices : La Turlutte, Lège-Cap-Ferret
Coup de filet au Cap-Ferret ! Rue des Goélands plus exactement, où Nathan Allard (ex-Le Dauphin, Déviant et Vivant 2 à Paris) et Tom Netzer (ex-Yachting au Cap Ferret) tranchent le lard aussi bien que le bar, et font rimer estomacs bien lestés et quilles sourcées derrière la devanture discrète toute de bois vêtue, jusqu’au comptoir aux airs de guinguette.
Meilleure auberge basco-saxonne : Elizaberriko Etxeberria, Hasparren
Retour aux sources (celle de l’Ardanavy) pour la restauratrice solidaire Eva Jaurena, fondatrice du réseau Ernest, son compagnon cuistot Alex Mahood et une poignée de locaux, qui ont ranimé une vieille auberge agonisante sur les hauteurs d’Hasparren. Là, dans une salle épurée-poutrée, le British (ex-Jones à Paris) fait mieux que du bouche-à-bouche au quartier Elizaberri avec ses canailleries franco-espagnoles.
Meilleur petit luxe : L’Arpaon, Paris
Preuve supplémentaire, s’il en fallait une, que le 18e n’est pas le dernier des arrondissements bistrologiques, cet Arpaon de Yann Botbol (vu au Servan), Nathan Sebagh (croisé à Candide) et Yann Derout (passé par Mamagoto), reprenant une formule qui a prouvé son efficacité : une devanture pour le moins aguicheuse (ici, vert impérial), une déco évocatrice qui va à l’essentiel (murs nus, chaises Thonet, grand miroir) et une cuisine qui se laisse voir.
Meilleure caviste : Gallianne Delaforge à Juste une Lichette, Brioude
Je te tiens, tu me tiens par la bar-lichette… Voilà le jeu proposé par Gallianne Delaforge aux Brivadois·es et visiteur·ses qui franchissent le pas de porte de sa cave. Quand elle ne pioche pas ses vignes dans la vallée du Haut-Allier, cette ancienne étudiante en droit passée par le Saint Eutrope tutoie les terroirs avec panache pour un boire meilleur et surtout mieux.
Meilleur esprit d’équipe : Café Belardi, Saint-Jean-de-Luz
Dans un quartier où les bistrots sont légion, ce riant rade luzien tire son épingle du jeu – en l’occurrence, un billard trônant au milieu de la salle… Luminaires seventies, zinc d’époque et bouquins de cuisine font le reste du décor, habité par une paire gagnante : l’œnophile Quentin Pierre-Antoine, auparavant à la cave toulousaine Poison, et la cheffe Agathe Baulu, passée chez Guérard, Bras et à Providence.
Meilleure nouvelle vague : Rivage, Saint-Pierre-Quiberon
Les capitaines du mythique Petit Hôtel du Grand Large ayant mis les voiles, c’est Pauline (repérée au Bristol) et Thomas Le Morlec (ex-George V, Bristol et Versance), rencontré·es à Ferrandi, qui ont repris la barre de cette auberge teintée d’iode, sur la côte sauvage de la presqu’île de Quiberon, avec sa grande salle lumineuse et sa vue sur la baie.
Meilleure popote : Glaz, Pont-Croix
Amer, le Finistère ? Pas dans le cajolant resto de la sommelière Émeline Macé (ex-taulière du bar à vins rennais Rewined) et du chef Tanios Nakhlé-Cerruti (aperçu à La Cavale, toujours à Rennes, et Carousel à Londres), qui font avaler des couleurs au cap Sizun – carreaux teinte mer (glaz en breton), mur sauge, grands tapis tissés… et dans les assiettes, rien que de la tendresse.
Meilleur service (en chambre) : Hôtel du Couvent, Nice
D’un ancien monastère du XVIIe à l’Hôtel du Couvent, il n’y a qu’un divin pas ! Franchi lentement mais sûrement par Valéry Grégo, fondateur du groupe britannique Perseus, et son architecte de frère Louis-Antoine Grégo. Ici, l’habit fait le moine, avec 88 chambres, trois piscines, autant de restaurants, des bains romains, un marché le samedi matin, une boulangerie, une herboristerie et même une bibliothèque ouverte à tout le monde.
Meilleur bar d’auteur : Povera, Nice
Avec ses murs grattés jusqu’à l’os et sa déco plus-dépouillée-tu-meurs, Povera aurait vite fait de passer pour un bar abandonné. Très vite fait, puisqu’une fois l’heure de l’apéro sonnée et le patron installé (Maxime Potfer, passé par l’Experimental Cocktail Club), les lieux ressuscitent au son des shakers et des glaçons.